Accident de la route : tout sur l’indemnisation du préjudice corporel
Vous êtes victime d’un accident de la route ? Peut-être êtes-vous éligible à une indemnisation pour les préjudices corporels qui en ont découlé ? Dans cet article, nous essayerons de comprendre ce que sont le DFP et le DFT, et nous intéresserons aux démarches à effectuer après un accident de la route.
Selon le FVI, le Fichier des Victimes Indemnisées, près de 100 000 personnes ont été indemnisées depuis le 1 juillet 2016. Ces statistiques font écho à la loi n°85-677 du 5 juillet 1985, à l’article 3 notamment. Dans ce texte mieux connu sous le nom de Loi Badinter, on trouve les mots suivants : ”Les victimes, hormis les conducteurs de véhicules terrestres à moteur, sont indemnisées des dommages résultant des atteintes à leur personne qu’elles ont subi, sans que puisse leur être opposée leur propre faute à l’exception de leur faute inexcusable si elle a été la cause exclusive de l’accident”.
Comment se déroule l’indemnisation du préjudice corporel par l’assurance ? Que faire en cas de désaccord avec cette dernière ? Comment l’indemnité est-elle calculée ? Cet article répondra à vos interrogations.
Que faut-il faire après un accident de la route ?
Certes, la principale préoccupation d’une victime d’accident de la route reste son état de santé. Les démarches administratives n’en sont pas moins essentielles. Il est en effet indispensable de respecter les délais prévus dans le contrat d’assurance sans quoi vous ne seriez plus éligible à l’indemnisation.
J+5 : déclarer le sinistre à l’assurance
Signalez impérativement l’accident de la route dans les cinq jours ouvrés qui le suivent. Pour ce faire, envoyez un courrier avec accusé de réception accompagné des pièces suivantes :
– Certificat d’hospitalisation ou certificat médical,
– Arrêt de travail,
– Lettre relatant les faits dont vous avez été victime,
– Témoignages écrits de personnes ayant assisté à la scène.
N’oubliez pas de rappeler les identités des protagonistes concernés par le sinistre et le numéro de votre contrat d’assurance.
Rencontrer des experts qui estimeront le préjudice corporel subi
La compagnie d’assurance mandate dans ce cas des médecins habilités à réaliser des expertises. Ces derniers transmettent leurs conclusions à l’assurance qui vous adresse à son tour un rapport dans les vingt jours après l’examen. Lorsque les lésions sont minimes, elle ne demande aucune d’expertise, mais se base plutôt sur un avis sur pièces, qui est une analyse attentive du certificat médical.
L’expertise devient cependant obligatoire dès lors qu’il s’agit d’une hospitalisation d’une durée supérieure à 3 jours, une IPP presque certaine ou un Déficit Fonctionnel Temporaire supérieur à 20 jours.
À compter de la transmission des rapports d’expertise, l’assurance dispose de 90 jours pour proposer une indemnisation. Ce délai est modulable : s’il s’avère difficile de déterminer les préjudices subis, cinq mois supplémentaires lui sont accordés. L’assuré n’est pas obligé d’accepter l’indemnité et a le droit de demander une réévaluation de sa situation. Les retards entraînent des taxes supplémentaires, à la charge de l’assurance (article 16 de la Loi Badinter).
Bien qu’une négociation amiable soit préférable, la victime décide parfois de mener l’affaire devant un tribunal civil. Nous y reviendrons en dernière partie.
Notons pour finir qu’il est possible de bénéficier d’un second avis médical, délivré par un professionnel indépendant de la compagnie d’assurance. Une liste exhaustive des Médecins Conseils exerçants est disponible sur le site officiel de l’ANAMEVA.
Contacter un avocat spécialiste en droit des dommages corporels
Vous l’avez compris, toutes les victimes ne sont pas éligibles à une indemnisation. En effet, le responsable de l’accident n’est pas couvert s’il est prouvé qu’il a commis une faute grave. Cela s’applique même s’il a souscrit à une garantie conducteur via son assurance automobile. Son indemnité diminue au prorata de sa responsabilité.
Prenons l’alcool par exemple. Le conducteur en état d’ébriété est exclu de toute forme d’indemnisation s’il a causé un accident de la route. Il devient également accessible à des sanctions pénales. En vertu de l’article L211-6 du Code des Assurances et de la loi Badinter susmentionnée, la compagnie d’assurance reste toutefois tenue d’indemniser les victimes.
Consultez votre contrat d’assurance multirisques habitation : peut-être bénéficiez-vous d’une protection juridique susceptible de prendre en charge les frais judiciaires ?
Un avocat vous aidera en outre à obtenir la meilleure indemnité possible. Il vous assistera si vous souhaitez poursuivre le responsable de l’accident. La plateforme Legalclient vous met gratuitement en relation avec l’avocat de votre choix. N’hésitez pas à lui soumettre votre dossier.
Comprendre l’indemnisation des préjudices corporels lors d’un accident de la route
Lors d’un accident de la route, les préjudices corporels sont évalués en fonction de l’impact qu’ils ont sur la vie quotidienne de la victime. Effectivement, certaines personnes ne travaillent plus, ne pratiquent plus d’activités sportives ou ne s’amusent plus comme elles le faisaient avant. Certaines perdent même leur autonomie.
Vous le savez, votre convalescence sera ponctuée d’expertises, toutes transmises à la compagnie d’assurance. Cette convalescence se déroule en deux temps : avant la consolidation et après la consolidation.
Déterminer le Déficit Fonctionnel Temporaire, ou DFT
La période suivant l’accident correspond généralement au temps d’hospitalisation. Une première évaluation sera menée : si votre incapacité est totale, vous êtes éligible à une indemnité équivalente à 50% du SMIC. Le DFT, anciennement appelé ITT (Incapacité Temporaire de Travail) sera calculé à cette occasion. Il détermine en réalité les séquelles immédiates qui découlent de l’accident.
Il existe deux grandes familles de DFT :
– La DFT totale, à 100%
– La DFT partielle, répartie en 4 classes.
La classe 1 concerne les incapacités de 10%, la classe 2 représente un déficit fonctionnel temporaire de 20% tandis que la classe 3 évoque une incapacité de 50%. La classe 4, pour sa part, englobe les DFT supérieures ou égales à 75%.
L’indemnisation moyenne pour un DFT total sera de 25€ par jour.
Puis le Déficit Fonctionnel Permanent, DFP
Excellente nouvelle, vous sortez de l’hôpital. La compagnie d’assurance demandera une nouvelle expertise qui établira l’entrée en période de consolidation. Le déficit fonctionnel permanent est à présent évalué.
Cette appellation compliquée se définit par une question simple : à quel point, à terme, les activités habituelles et l’organisme de la victime sont-ils altérés ?
La douleur ressentie et les séquelles (physiques ou psychologiques) sont estimées et quantifiées en points, de 0 à 100. C’est l’AIPP, Atteinte à l’Intégrité Physique et Psychique.
Le DFP diffère par exemple du Préjudice d’Agrément, puisqu’il porte sur les actes essentiels du quotidien et non sur les loisirs auquels la victime n’accède plus.
Selon la nature du préjudice retenu, les points attribués varient. Par exemple, un point de DFP vaut 1 300€ chez une victime de moins de vingt ans. Il vaut environ 1 000€ chez une personne âgée de 40 à 49 ans. Il existe donc un barème qui considère les souffrances endurées et les conséquences définitives de l’accident de la route.
En conséquence de quoi nous dirons que le DFP s’estime en fonction de l’AIPP ou du taux d’IPP, terminologie définie dans la partie suivante.
Qu’est-ce que le taux d’Incapacité Permanente Partielle, l’IPP ?
Le taux d’Incapacité Permanente Partielle rejoint le DFP. Il est un synonyme du taux d’Atteinte Physique et Psychique. Une nuance cependant : le taux d’IPP est calculé en pourcentage et non en points. Comme l’AIPP et la souffrance endurée, il est un critère qui détermine à quelle indemnisation la victime d’un accident de la route peut prétendre.
Précisons que la notion d’IPP n’est pas réservée à la thématique des accidents de la route. Elle concerne aussi par exemple les maladies professionnelles.
Convention IRCA : Accélérer le versement des indemnités liées à un accident de la route
La Convention d’Indemnisation et de Recours Corporel Automobile répond à la loi Badinter et à l’article L 211-9 du Code des Assurances.
Cette convention est un contrat signé par certaines assurances. Il vise à indemniser rapidement les victimes légères d’accidents corporels à condition que le sinistre ait eu lieu en France, et implique deux véhicules terrestres. Pour qu’elle en bénéficie, l’IPP de la victime ne doit pas dépasser les 5%. Il n’est par exemple pas possible d’invoquer la convention IRCA dans le cas d’un piéton renversé.
Comme pour l’indemnité classique, la somme d’argent proposée dans le cadre d’une Convention IRCA est refusable. Il vous est tout à fait possible de décliner l’offre faite par votre assurance, et de choisir de vous constituer partie civile.
Ce chapitre s’appuie sur le Rapport Annuel 2018 du FVI (publié en 2020). La page 10 précise notamment que 71,7% des blessés avec AIPP sont indemnisés dans les 24 mois qui suivent la survenance de l’accident. Si la victime est décédée, les statistiques passent à 57,1%.
Se constituer partie civile lors d’un accident de la route
Il arrive que les ententes à l’amiable échouent entre l’assureur et la victime. Des médiations sont alors entreprises ; elles sont obligatoires avant de saisir un tribunal. La compagnie d’assurance travaille généralement en réseau. Elle suggérera un professionnel susceptible de régler le litige sans passer par une procédure judiciaire.
La judiciarisation est le fait du Procureur, qui décide ou non de classer l’affaire « sans suites » en fonction des éléments à sa disposition. C’est à ce moment que la victime peut choisir de se constituer partie civile. Si l’auteur des faits est reconnu coupable, il sera condamné à verser une amende, voire à une peine de prison.
L’amende (sanction administrée à l’auteur) et les indemnités (réparation versée par l’assurance) sont deux choses différentes et complémentaires.
Au civil
Les tentatives de conciliation échouent l’une après l’autre. Le montant de l’indemnisation proposé par votre assurance ne vous convient pas. Il est alors temps d’entamer une procédure au civil, devant le tribunal judiciaire. L’avocat ne sera obligatoire que si les sommes en jeu dépassent les 10 000€.
Si vous espérez le versement d’une provision préalable à l’indemnité pour préjudices corporels, vous pouvez saisir le tribunal en référé. La procédure est ainsi accélérée.
Quelle que soit la démarche entreprise, elle nécessite une préparation en amont. En effet, c’est à la victime de prouver le lien entre son état de santé et l’accident. Toute preuve démontrant sa bonne santé avant le sinistre se révélera utile : certificat d’aptitude au sport, licence d’un club, diplôme… Conservez également tous les documents médicaux fournis par l’hôpital : radiographies, analyses…
Conformément à l’article 1111-7 du Code de la Santé Publique, le centre hospitalier est tenu de les fournir dans un délai de huit jours. Si l’hospitalisation était d’une durée supérieure à cinq ans, ils ont en revanche deux mois pour produire les pièces justificatives.
Pour vous constituer partie civile, faites la demande au greffe du tribunal de la ville où s’est déroulé l’accident. Pour cela, il suffit de remplir le cerfa n°16042*01, d’y joindre les preuves en votre possession et de l’envoyer A/R.
Au pénal
Pour vous constituer partie civile au pénal, il y a deux solutions. La première est de venir le jour de l’audience, éventuellement accompagné de votre avocat. La seconde est d’envoyer un courrier A/R au président du greffe du Tribunal Judiciaire. Ce courrier comportera les documents prouvant l’évolution de l’état de santé de la victime, un rappel des faits écrit et la mention « […] déclare me constituer partie civile conformément aux articles 418 et suivants du Code de Procédure Pénale […]« .
Notons qu’il est désormais possible de se constituer partie civile par voie électronique ou télécopie. L’essentiel est que la demande parvienne au greffe 24 heures avant la date d’audience.
Voici un modèle de courrier officiel proposé par le Ministère de la Justice.
Bon à savoir : un juge considère qu’une partie civile absente signifie qu’elle renonce à ses indemnités. Il lui sera impossible de faire appel par la suite.
Si leurs revenus ne leur permettent pas d’assumer les honoraires d’un avocat, les parties civiles peuvent faire une demande d’aide juridictionnelle.
Pour conclure, nous rappellerons simplement que les victimes directes d’un accident de la route ne sont pas les seules personnes éligibles à une indemnisation. En effet, les parents, conjoints et enfants dites victimes indirectes, peuvent y prétendre, lorsque la victime est décédée notamment. L’AIPP est calculée de la même manière, et associée à un préjudice d’affection, comme l’indique l’article 12 de la Loi Badinter.